Une caractère cosmologique
Tractatus Ayyew
Livre Un | Chaptitre 4
837 mots

AU COURS DES QUATRE DERNIERS MILLIARDS D'ANNÉES, avec la combinaison singulière de l'orbite, du spin, et de la chimie de notre planète, s'est jouée la grande partition cosmique. Ainsi, alors que cette configuration unique de matière et d'énergie se déployait, une roche autrefois stérile s'est transformée en la biosphère florissante qui est aujourd'hui notre maison commune. De tout ce que nous savons des autres planètes de notre système solaire et de notre galaxie, c'est une histoire extraordinaire et épique. Cependant, ce qui rend l'histoire encore plus remarquable, c'est que les conteurs en font partie intégrante.

Notre récit de l'histoire de la Terre n'est possible qu'à travers une vaste et unique confluence de matière et d'énergie; la spirale du carbone dans des configurations toujours plus concentrées et complexes, la dispersion de l'énergie solaire dans des organismes et des écosystèmes toujours plus diversifiés; et à travers tout cela l'inexorable déploiement de la conscience dans une myriade de formes. Alimentés par du carbone ancien compacté, nos derniers siècles de civilisation et de science ont pu mettre à jour à la fois l'histoire de la Terre et la nôtre.

De ce vaste point de vue, nous devons maintenant revoir nos jugements sur les plastiques-- et de nous-mêmes.

Plutôt que d'être submergés par le désespoir de l'épuisement écologique moderne, nous devrions être impressionnés par l'acte ancien et actuel de l'enrichissement écologique de la Terre.

La façon dont notre planète - en tant que système cosmologique unique - a géré sa matière et son énergie et a conduit au verdissement constant de sa surface ; la culture d'une diversité, d'un dynamisme et d'une abondance de vie toujours plus grands.²⁶  Et finalement, grâce à l'émergence de la conscience qui en a résulté, nous avons été poussés à réfléchir au processus lui-même.

Alors, d’où partons-nous?

Tout d'abord, tenons-nous en fermement à notre point de vue et à la vaste vision qu'il offre.

De là, nous pouvons observer un autre phénomène planétaire crucial. Mis à part les impacts de météores et les volcans massifs, c'est un phénomène invisible sur la planète depuis des millions d'années. En raison des actions de l'humanité moderne, cela fait des éons que les processus, les cycles et les systèmes de la Terre ont ajouté et accumulé brusquement plus de carbone dans l'atmosphère qu'ils n'en ont retiré.²⁷

Le déclin de la vitalité et de la diversité de la biosphère qui en a résulté, comme nous le savons trop bien maintenant, ne peut être imputé qu’à notre manipulation du carbone ancien.

Cependant, tout comme un jeune qui construit un château de cartes pour la première fois, nous avons beaucoup à apprendre de ce moment. Les parents savent bien que les adolescents sont trop souvent emportés par le frisson et la tentation d'assembler une grande construction. Ensuite, lorsque inévitablement les cartes s'effondrent, lorsque les résultats ne sont pas ceux escomptés, le jeune contrarié s'en veut invariablement et les rejette.

Bien sûr, aucun des deux n'est à blâmer.

Ce n'est qu'après la première chute que l'on peut saisir la compréhension du jeu.

Il n'y a pas d'autre moyen.

De même, notre perturbation des cycles écologiques n'est pas plus une conséquence de notre nature que celle du carbone ou de l'oxygène²⁸ C'est plutôt la façon de jouer : le schéma fondamental par lequel nos processus ont utilisé l’énergie et la matière.

Comme nous l'avons vu dans l'histoire du plastique, nos processus modernes ont de plus en plus créé des modèles d'énergie et de matière qui ont dispersé le carbone, concentré l'énergie, réduit la biodiversité et étouffé la conscience écologique. À l'opposé, les processus de la Terre ont tendu vers le contraire : la concentration du carbone, la dispersion de l'énergie, l'augmentation de la diversité et la croissance de la conscience. Alors que notre modèle de processus moderne a dégradé les écosystèmes, celui de la Terre les a systématiquement enrichis, les rendant de plus en plus diversifiés, vitales et abondants.²⁹

Comme un enfant désespéré et déterminé lors d'un nouvel essai au château de cartes, nous essayons plus fort que jamais. Avec la honte de nos échecs, nous avançons tête baissée, nous efforçant vaillamment de construire plus fort et plus haut : pour rendre nos procédés moins nocifs, moins polluants, moins dégradants, moins gris. Cependant, malgré tous nos efforts, notre pollution ne cesse d'augmenter car, au fil du temps, toute amélioration de l'efficacité de nos processus gris a été inévitablement éclipsée par leur prolifération. Car avec le motif gris sous-jacent de nos processus inchangés, même s'ils font moins de torts, tort ils restent quand même.³⁰

Banayan et moi en sommes venus à voir qu'il est temps de lever la tête du guidon.

Et de la honte.

Encore une fois, plutôt que de désespérer, nous pouvons être inspirés.

Notre utilisation du carbone accumulé qui ne se produit qu'une fois tous les millions d'années est en fait un âge d'opportunité.

Pour la première fois, de part notre utilisation du carbone si intense, la différence fondamentale entre notre schéma moderne et celui de la Terre peut être observée avec une clarté sans précédent. Dans le contraste saisissant des schémas, nous pouvons commencer à discerner le caractère cosmologique planétaire qui a propulsé l'inexorable transformation d'une roche stérile en une biosphère épanouie: le schéma par lequel la Terre a géré sa matière et son énergie à travers des processus, des cycles et des systèmes vers l’enrichissement de tous.

Et de la même manière, à travers la dissonance écologique de notre société contemporaine, notre regard moderne peut désormais reconnaître ces sociétés - anciennes et actuelles - qui ont depuis longtemps atteint une résonance avec le modèle et le caractère de la Terre.³¹

Des nations autochtones anciennes et actuelles, qui, rien qu'en s'épanouissant, ont enrichi la vitalité, la diversité et l'abondance des écosystèmes dont elles faisaient partie.

Des nations qui, tout comme la Terre, ont cultivé des richesses communes pour tous et chacun.



Notes du chapitre